Connaître la fréquentation d’un quartier, d’un site ou d’un espace public… est utile aux professionnels du tourisme, du développement local comme aux géomarketeurs. Si l’ouverture reste balbutiante, elles suscite un réel intérêt des acteurs.
A Bordeaux, les entrées-sorties du métro publiées en open data par la métropole sont utilisées par le quotidien 20 minutes pour ajuster la distribution du journal à la fréquentation effective des stations. Ainsi, le groupe de presse limite le nombre de journaux non distribués et les frais de manutention associés. Cet exemple montre comment une donnée « transport » peut être monétisée par un acteur économique du territoire. Et a fortiori, ce sont les tous les professionnels du « géomarketing » qui exploitent l’open data pour un champ d’application très large : implantation d’enseignes, développement économique et touristique… C’est notamment un enjeu pour les villes souhaitant agir sur leur attractivité commerciales. Avant d’agir sur leur “coeur de ville” il s’agit en effet de connaître précisément la fréquentation des rues commerçantes. Pour constater par exemple, comme à Aix en Provence, qu’il y a un pic de fréquentation entre 12h et 14h… quand les commerces sont fermés !
Les données de mobilité, un gisement en expansion
Des sociétés de géomarketing comme Cityscan, Geocible, Mytraffic… exploitent de nombreuses données ouvertes – qui viennent s’ajouter à des données achetées comme par exemple les transactions de CB – pour réaliser des études marketing et proposer des lieux d’implantation à des marques. Quelles sont les données particulièrement prisées ? Celles exprimant des flux car elles permettent d’établir une fréquentation et – en fonction de leur granularité – de connaître les variations périodiques. Outre les données de transport par arrêt/ stations (voir celles de la RATP), certaines collectivités fournissent des comptages routiers comme le propose par exemple Paris ou le CD44. Les flashs des radars automatiques sont également utilisés pour évaluer la fréquentation d’un territoire. On notera qu’avec la loi d’orientation sur les mobilités discuté au printemps 2019, la publication de données de flux – des trottinettes aux bus en passant par les vélos – va devenir obligatoire.
Des données télécoms… payantes
Autre donnée de flux exploitée, les connexions aux réseaux télécoms. Depuis plusieurs années, Orange et Bouygues Telecom proposent des offres – payantes – particulièrement prisées des acteurs du tourisme. Les données de fréquentation touristique « classiques » – fréquentation mensuelles de musées, sites, offices de tourisme – s’avèrent en effet insuffisantes pour analyser des flux et connaître les origines/destination. Les données mobiles (cartes SIM géolocalisées et anonymisées) s’avèrent beaucoup plus complètes en indiquant les lieux (y compris un espace naturel ouvert), les parcours, les périodes, les durées et même la nationalité des visiteurs… (ici des cas d’usage de FluxVision). Elles sont cependant onéreuses et leur utilisation ne peut être que ponctuelle. Aussi certaines collectivités cherchent à exploiter – voire à mettre à disposition en open data – d’autres gisements comme celles des horodateurs, les données GPS ou les connexions Wifi.
Le Wifi, une fausse piste ?
La donnée GPS est intéressante (Lire interview). Elle est du reste commercialisée par certains acteurs et largement utilisée par les GAFA – par exemple pour calculer l’affluence à des lieux comme le propose Google maps – mais est rarement disponible en open data, ou alors sous forme de “traces” comme dans le cas d’applications de suivi de performances sportives (randonnée, course…). Il faut dire qu’elle est extrêmement sensible. Quant au Wifi – qui fait l’objet de plus en plus de réseaux publics gratuits – il permet de capter les identifiants des appareils surfant sur internet et tous les smartphones qui « cherchent » un réseau. Un professionnel du secteur du marketing invite cependant à s’en méfier : « les données sont captées à 360° ce qui fait que dans un immeuble, par exemple, on ne sait pas à quel étage l’utilisateur se trouve… sans compter que cela peut être plusieurs machines d’un même utilisateur ». Les données de localisation des mobiles sont une autre piste. Mais Google, Apple, et les constructeurs de mobiles sont les seuls à disposer (via le système d’exploitation) de données vraiment exhaustives/ volumineuses. Et s’ils fournissent un accès à ces données c’est de manière parcimonieuse ou moyennant finance.
Libérer les data des tourniquets
Une autre possibilité est de créer de la donnée en utilisant soit des capteur dédiés – capteurs optiques, magnétiques ou vidéo – soit en connectant des objets qui ne l’étaient pas auparavant. Une borne peut ainsi être utilisée pour transmettre un comptage issu de c voire tout simplement de connecter un tourniquet basique comme le fait la startup Affluence (interview). Ces données sont aujourd’hui surtout diffusées en temps réel pour informer le public sur la fréquentation et la disponibilité d’un équipement, l’historique étant récupéré par la collectivité pour créer des tableaux de bords et des analyses. La mise en open data de ces données reste rare tout comme les API permettant de l’intégrer à un site ou à une application tierce. Elles pourraient pourtant intéresser spécialistes du marketing comme de nombreuses applications urbaines.
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Interview de Paul Bouzol, CEO d’Affluences
Entretien avec Sylvain Coppéré, Kisio Etude & Conseil
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