Comment est né le projet Transfermuga ?
Au départ il y a une étude de l’eurorégion Aquitaine-Euskadi sur les flux transfrontaliers montrant que 95 % des déplacements transfrontaliers s’effectuaient par la route, 70 % ne concernant que le triangle Hendaye-Irun-Fontarrabie. Pour développer l’usage des transports en communs, il est très vite apparu indispensable d’améliorer l’information voyageur disséminée sur une dizaine de sites d’autorités organisatrice de transport (AOT) des deux côtés de la frontière. N’étant pas AOT, dans un contexte juridico-administratif extrêmement complexe, l’eurorégion a opté pour démontrer l’intérêt de l’information multimodale en créant en à peine deux mois le premier portail d’information voyageurs transfrontalier ! Car si nous avions été voir chaque collectivité pour lui demander ses informations et son autorisation, nous y serions encore… Cette preuve de concept a permis de convaincre les collectivités dans le cadre de la seconde phase : la création d’un calculateur d’itinéraire transfrontalier, multimodal et multilingue. Celui-ci nous a servi d’alibi pour les pousser à ouvrir leurs données. Les financements européens ont aidé, la préexistence de données ouvertes côté espagnol, aussi.. L’eurorégion a pu se concentrer sur l’accompagnement open data des collectivités françaises.
Quelles données et services propose aujourd’hui le portail Transfermuga ?
Pleinement fonctionnel depuis l’été 2015, le portail présente en quatre langues l’ensemble de l’offre de transport. Le calculateur d’itinéraires, disponible depuis l’été 2017, utilise quant à lui une trentaine de jeux de données – bus, cars transfrontaliers, TER, TGV… Il permet de calculer son trajet transfrontalier, mais aussi au sein d’une même agglomération, ou encore pour aller en TGV jusqu’à Paris. Il propose différentes options et intègre aussi la marche, le vélo et le covoiturage quand il n’y a pas de possibilité de transports en commun. On compte 650 000 visites et 300 000 visiteurs uniques depuis sa création. Les données sont proposées en open data et sous forme d’API. Cela permet en gare d’Hendaye (300.000 voyageurs SNCF, 700.000 voyageurs Euskotren) ou à l’office de tourisme de Bayonne de fournir une information contextualisée (ici, maintenant) à des touristes qui ne connaissent pas nécessairement l’existence de Transfermuga et bientôt la même chose à l’aéroport de Biarritz (1,1 millions de voyageurs par an).
Quel bilan tirez-vous de ce projet ?
Il faut partir des usages, des bénéfices utilisateurs pour convaincre : l’open data n’est qu’un moyen ! Il est possible d’ouvrir n’importe quel jeu de donnée mais sans finalités précises, le risque est de dépenser de l’argent pour rien. Ensuite l’open data ne se fait pas tout seul : le facteur humain est décisif pour « évangéliser », animer et garantir la pérennité du projet. Pour susciter les réutilisations – encore balbutiantes pour Transfermuga – il faut par exemple aller à la rencontre des gens et réussir à sortir de son métier (la mobilité pour ce qui me concerne), le transport n’étant qu’une brique de service intéressant de très nombreux acteurs. La masse critique est enfin indispensable. Elle nous a permis de signer une convention avec la SNCF pour obtenir les données TGV, une première sur notre territoire. Mais elle n’est pas encore suffisante pour intéresser un Citymapper concentré sur les grandes métropoles…